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9 avril 2010 5 09 /04 /avril /2010 13:00

 

 

petrifier le temps 2

 

Les journées s'empilent sans qu'il en reste rien : s'écroulent sur elles-mêmes.

Nous comptons sur le temps pour nous servir de fondation, pour arrimer nos actes. C'est un terrain en perpétuel glissement. Une terre trop gorgée pour être stable : tout ce sang déjà sur elle déversé. Tous ces désirs imbibés.

Alors, pour continuer la course sur un terrain moins meuble, nous installons un fond à l'arrière de nos horloges. Quelques chiffres pour une course récurrente, tourner en rond pour ne pas tomber plus bas.

Nous comptons sur le temps et c'est lui qui nous compte.

Au moins maintenant c'est mesurable, on a entre le temps et nous un bel écran imprimé de chiffres : un décor.

Au moins maintenant c'est du solide, on a quelque chose de stable sur quoi s'appuyer. Nos fondations ont des allures de pierres tombales.

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6 avril 2010 2 06 /04 /avril /2010 21:20

 HPIM6418

Mon personnage pratique la politique de la chaise vide. Bien obligée, alors, d'asseoir autre chose ici. Autrement ça rouille. Ca rouille non seulement sur la chaise du haut, mais aussi sur la chaise du bas. Chaise du haut : siège de la fiction empilé par dessus l'ego de celui (celle) qui écrit, pour protéger la chaise du bas : une sorte de housse protectrice. Sauf que la housse est trouée. La protection, comme toujours, est un leurre, mais quelle idée aussi de vouloir s'asseoir à l'extérieur.

Une chaise sur une autre : c'était un faible moyen aussi de prendre un peu de hauteur.

Et puis l'empilement : la panacée pour ne pas encombrer l'espace. Mais deux chaises même l'une sur l'autre quand aucune ne sert c'est encore beaucoup de place perdue. Seule solution : changer d'espace.

Changer d'espace ce n'est pas forcément voyager. Suffit parfois, pour s'inventer un exotisme, de bouger les meubles. Reprendre les mêmes choses, les disposer autrement.

Et puis un petit coup de peinture.

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2 avril 2010 5 02 /04 /avril /2010 00:02


Parcours jaune

Vases communicants d'avril avec Loran Bart, Les lignes du monde.
Merci à lui pour ce beau texte (pour l'image, cliquer dessus pour l'avoir en mieux ou ici)


Ce texte est une divagation sur l’illustration d’Alain Gobenceaux intitulée Le Parcours jaune.

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Comme je prépare ce déménagement ; cet abandon définitif de la ville tentaculaire ; comme je range et jette moult choses ; je retrouve, dans un carton à dessin vert et noir,  Le Parcours jaune.

 

Ce qu’il appelait Le Parcours jaune, il m’en fit un dessin, un jour, comme ça, c’est venu de lui, je crois qu’il voulait en parler, commémorer ce lieu-pan de sa vie. Le parcours jaune, il me le gribouilla sur une feuille volante, sur un coin de table, juste pour que je comprenne, pour illustrer son propos. Il y a la forme et il y a le fond. La forme vous l’avez ci-dessus. Le fond est compris dans la forme, toujours, depuis Rodin pour qui une statue devait exprimer l’être physique mais aussi tout ce qu’il y a autour de cet être, tout l’impalpable, tout l’œuvre du génie. Je vais essayer de vous déplier le fond de cette forme. Le Parcours jaune est un rectangle relativement allongé en largeur, il est surtout jaune, mais on y trouve aussi un peu de rouge et de vert ; des crayonnés noirs et une multitude de flèches ouvrant le parcours bien au-delà du cadre de la feuille, vers des marges mystérieuses. Ce Parcours jaune est comme un cardo & un decumanus. Le cardo est ici une rivière dont le cours file vers le Nord ; presqu’un torrent, au débit vif et vivifiant. Il me précisa, en me montrant un point au Sud du pont (au niveau de la pointe de la flèche la plus en bas à gauche) - un pont nommé Dessus, comme devraient finalement s’appeler tous les ponts - que c’est là qu’il plongeât un jour d’octobre, quelques 30 ans auparavant, pour rattraper le chien d’une mamie qui avait été emporté par une bourrasque plus violente ; il me dit qu’il en ressortit immédiatement enrhumé. Ce pont est le point de croisement du cardo, fluvial donc, et du decumanus, routier, lui, puisqu’il s’agit d’une simple rue de ville. A l’extrême Est de ce decumanus se trouve une Salle des faits qui avait, à l’époque, l’immense avantage d’être multifonction et de pouvoir être utilisée à loisir comme salle des fêtes ou bien salle des faîtes. Comme les habitants du quartier ne semblaient pas être vraiment des joyeux drilles, c’est plutôt cette dernière nomenclature qui servait : en effet, quelques jeunes gens avaient l’habitude de se réunir sur le toit pour sauter dans un parc municipal voisin. Il va sans dire que cela entraînait régulièrement des jambes cassées et des tassements de vertèbres parmi les concurrents. A l’Ouest du pont Dessus se trouvait visiblement plusieurs ronds-points dont un souterrain (d’où son nom : le rond-point Dessous). Cette rue decumanus reliait les 2 points névralgiques de la petite ville, la salle des Faîtes et La Grande administration, un bâtiment réalisé par un architecte post-stalinien - pavé situé architecturalement entre le Palais des Soviets de Kaliningrad et le Centre National de la Danse de Pantin - dont l’accès se faisait par le Nord. Et au centre du centre, le point d’orgue, le point encore plus jaune de ce Parcours jaune, un chorten d’Amérique latine, rapporté par un notable-explorateur de la ville quelques 150 ans en avant. Un chorten dont on continuait d’honorer le dieu inconnu, faisant quelques circumambulations à chaque solstice. Cette manifestation silencieuse tournait, à ce qu’il me dit, tout au long desdites journées, tout autour et autour du monument.

 

Voilà ce qu’il me dit, un soir, dans un restaurant Pygmée de la ville tentaculaire, voilà du moins ce dont je me souviens, de ce qu’il appelait Le Parcours jaune.

 

Nathanaël Gobenceaux

 

 

Tous les participants à vases communicants (un grand merci à Brigitte Célerier pour le travail patient et attentif de nous lister tous) :
 
Kouki Rossi http://www.koukistories.bl ogspot.com et Luc Lamy http://www.luclamy.net/blog
pendant le week-end
http://www.pendantleweekend.net/ et ruelles http://ruelles.wordpress.com/
Jean Prod'hom
http://www.lesmarges.net/ et Juliette Zara http://enfantissages.free.fr/
Mariane Jaeglé
http://mariannejaegle.over-blog.fr/ et Anthony Poiraudeau http://futilesetgraves.blogspot.com/
Cécile Portier
http://petiteracine.over-blog.com et Loran Bart http://leslignesdumonde.wordpress.com/
Christophe Sanchez
http://fut-il-ou-versa-t-il.blogspot.com et Murièle Laborde Modély http://l-oeil-bande.blogspot.com
Christine Jeanney
http://tentatives.eklablog.fr et Kathie Durand http://www.minetteaferraille.net/
Sarah Cillaire
http://sarah-cillaire.blogspot.com/ et Anne Colongues http://aout-en-attendant.blogspot.com/
France Burguelle Rey
http://france.burghellerey.over-blog.com et Eric Dubois http://ericdubois.over-blog.fr
Fleur de bitume
http://promenadedunefleur.blogspot.com/ et chez Jeanne http://chezjeanne.free.fr/
Mathilde Rossetti
http://matro7isoupirail.blogspot.com et Lambert Savigneux http://aloredelam.com
Antonio A. Casilli
http://www.bodyspacesociety.eu/ et David Pontille http://www.scriptopolis.fr/
RV.Jeanney
http://rvjeaney.wordpress.com Jean-Yves Fick http://jeanyvesfick.wordpress.com
Brigitte Giraud
http://paradisbancale.over-blog.com/ et Dominique Hasselmann http://dominiquehasselmann.blog.lemonde.fr/
Guillaume Vissac
http://www.omega-blue.net et Juliette Mezenc http://juliette.mezenc.over-blog.com/
Michel Brosseau
http://www.xn--chatperch-p1a2i.net/ et Arnaud Maïsetti http://www.arnaudmaisetti.net/spip/
Florence Noël
http://pantarei.hautetfort.com/ et Brigitte Célérier http://brigetoun.blogspot.com 
Guillaume Vissac http://www.omega-blue.net avec Juliette Mézenc http://juliette.mezenc.over-blog.com/ 

 


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30 mars 2010 2 30 /03 /mars /2010 21:07

disparue, personnage de fiction

Pas loin de 10 000 personnes disparaissent en France chaque année. Que dans le lot se glisse un personnage de fiction n'est pas improbable. N'est pas improbable non plus que ce personnage de fiction refasse surface un jour, de son propre mouvement, ou à l'issue de recherches assidues.

Les motifs de sa disparition nous échappent. A t-elle été enlevée? Un commentateur par exemple? Je n'ose le soupçonner : ils sont rares et de bon aloi. Mais enfin, si jamais, qu'ils se signalent.

Mais alors si ce n'est pas contre son gré qu'elle part, qu'est-ce qui la pousse? Sa vie de famille lui est douce, pourtant. Autant qu'on le sache, avec des hauts et des bas, qui n'en a pas.

L'horripilait, peut-être, d'être ainsi surveillée, décrite, tracée. Comme nous tous écrite de l'exterieur d'elle-même. La fascinait, peut-être, l'horizon d'invisibilité et la liberté que cela lui donnerait de l'atteindre. Mais atteint-on l'horizon? Disparue, la voici non pas rayée des cadres mais au contraire inscrite dans de nouveaux fichiers, plus pointilleux, moins oublieux encore que les autres.

Elle reviendra, j'espère. Elle reviendra car elle a encore à prouver cela, qu'écrite de partout elle reste un mystère.

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26 mars 2010 5 26 /03 /mars /2010 13:11

en amour vous êtes

Thierry ne dort plus depuis que lundi, Nathalie a disparu. Pendant la journée, il s'épuise en recherches stériles, en spéculations vaines. Il préfère aujourd'hui penser qu'elle est partie de son plein gré. Il préfère penser cela, plutôt qu'imaginer autre chose. Mais il suffit de mettre cette digue à sa pensée pour qu'aussitôt elle cède.

Les questions des enfants se raréfient, comme pour le protéger, lui.

Il a pris des jours de congés, pour se concentrer sur ses recherches. Il a fait les déclarations au commissariat, est allé voir Oracle, les parents, les amis... Il n'a plus d'endroit où aller que sur internet. Et toutes les cinq minutes consulter la boite mail, au cas où.

Il tombe sur ce mail de Libé, lui proposant, à l'occasion du Salon du livre, de gagner un Ipad en répondant au grand jeu concours Libé/Points commun. Il ouvre, il clique, ça va le détendre deux minutes.

On lui demande de choisir parmi une liste les auteurs et les ouvrages qu'il préfère. Il clique notamment sur Un merveilleux malheur, de Boris Cyrulnik. Et puis aussi sur Dictionnaire amoureux de Venise, pas parce qu'il l'a lu mais parce qu'ils y sont allés ensemble, et amoureux. Il clique sur Microfictions, sur Truisme, et puis sur L'Adversaire aussi, car parfois lui traverse l'esprit que Nathalie serait une mystificatrice depuis le début.

Il a fini sa sélection, il valide, et voilà qu'apparaît, sous le gros titre EN AMOUR, VOUS ETES : un portrait amoureux de lui-même. Il apprend ainsi que pour lui, "au quotidien, il faut que ça déménage. La routine et l'excès de confort sont les plus sûrs tue-l'amour.". Au moins en ce moment ne souffre t-il pas trop de ce côté là, pense t-il. Il apprend aussi que, "comme Milan Kundera, il tente de comprendre les mécanismes de l'amour sans perdre pour autant sa capacité d'émerveillement". Que cette attitude rassure ses partenaires, qui aimeraient bien pourtant parfois que se réveille en lui "son côté Valmont".

Puis vient une proposition sur étalage de divers profils de femme, classés selon le pourcentage d'affinités culturelles avec son propre profil. En option, une possibilité de filtre sur l'âge.


pourcentage d'affinités culturelles

Il reste médusé, qu'on lui propose si vite une solution de remplacement.



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24 mars 2010 3 24 /03 /mars /2010 19:37

ombre profil de Nathalie 

Toujours pas de nouvelles de Nathalie. Toutes démarches infructueuses. Elle n'a pas utilisé son téléphone portable, pas tiré d'argent. Aucun mouvement d'elle enregistré, aucune trace recueillie. C'est comme si elle s'était évaporée.
La seule chose, hier soir, son mari en passant dans une rue a cru reconnaître son profil en passant devant une fenêtre. Il a noté l'adresse, en se traitant de fou.

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22 mars 2010 1 22 /03 /mars /2010 22:05

 

radar

Ce matin Nathalie s'est levée à 7h00, elle a préparé le café, pris sa douche, est revenue s'habiller dans la chambre. Son mari lui a demandé pourquoi elle mettait ce jean et ce pull rouge pour aller travailler. Nathalie a haussé les épaules, l'air de ne pas savoir elle-même. "Tu sais, de toute façon c'est bientôt la fin de ma mission chez Oracle". Puis elle a souri, et est repartie dans la cuisine. Elle était un peu en retard pour emmener les enfants à l'école, alors elle n'a pas pris le temps de l'embrasser, elle a juste dit bonne journée, et peut-être elle l'a dit d'une manière différente de d'habitude, d'une manière moins distraite, mais comment savoir si on ne se raconte pas des histoires après coup?
C'est Julie, la grande, qui lui a téléphoné à 19H en lui disant c'est bizarre, maman n'est pas rentrée alors que d'habitude elle est là bien plus tôt, qu'elle a déjà récupéré les deux petits chez la voisine. A cette heure là d'habitude elle prépare à manger.
Après ça a été des coups de fil partout. Au travail on ne l'avait pas vu, chez ses parents pas de nouvelles d'elle, chez son amie Christine, non plus.

La seule qui l'ait vue après qu'elle ait déposé les enfants à l'école, c'est la voisine, justement, celle qui prend les enfants le lundi ; elle l'a croisée par hasard avant qu'elle ne prenne le métro à Nation, du moins, elle avait l'air d'aller vers le métro.

Après, plus rien.
Pourtant, hier tout était normal. On avait regardé ensemble les résultats à la télé, pas trop longtemps parce que c'est toujours les mêmes qu'on voit. Et dans la journée pas de dispute. Pas de bonne humeur excessive et suspecte non plus. Normal, quoi.
Mais voilà, ce matin, pourquoi a t-elle mis ce jean et ce pull rouge, et pourquoi n'a t-elle pas pris le temps de l'embrasser?
Mais à 22h30, il est certainement encore trop tôt pour s'inquiéter.

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19 mars 2010 5 19 /03 /mars /2010 15:15

front national -elections touche echap

 

Nathalie Pages n'a pas forcément une conscience politique claire, et nous pourrons un jour regarder en détail les fluctuations de ses votes au gré des élections. Sa confiance envers les politiques : peut-être bien assez faible. Dans le baromètre de la confiance politique, seulement 2% des personnes interrogées citent en premier les politiques quand on leur demande qui est à même de défendre leurs intérêts. Mais elle a voté dimanche dernier, et votera dimanche prochain. Car même si la démocratie qu'on lui propose est imparfaite, elle sait que certaines forces sont à l'oeuvre qui voudraient en finir définitivement avec l'idée même de démocratie. Et ces forces là s'étendent tranquillement en Europe, leurs idées progressent, se déguisent habilement sous des dehors plus acceptables. De cela, Nathalie ne veut pas. Elle pense encore, même si c'est ringard, que les élections sont un moyen de faire entendre sa voix.

 

moyens d'influence

Chiffres : www.cevipof.com (dossiers élections régionales et baromètre de la confiance politique)

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15 mars 2010 1 15 /03 /mars /2010 07:15

abstention 
23 millions de personnes lasses, qui n'y croient plus.
23 millions de personnes trop occupées hier.
23 millions au dessus des enjeux politiques, ou bien à qui on ne la fait plus.
23 millions de personnes de gauche ou de droite pour qui la droite ou la gauche ne veut plus rien dire, en tout cas plus rien dans l'isoloir. Que pensent-ils ceux-là ce matin? Rien? Ou alors des petites choses comme ça : "De toute façon c'était seulement les régionales. De toute façon il y a les sondages, de toute façon il y a les pantins télévisuels pour prendre ça en charge à notre place". Ou bien des choses plus subtiles sur la confiscation du vote, la pseudo démocratie, etc...
23 millions : plus d'un électeur sur deux
Pour une fois Nathalie Pages est minoritaire, car elle est allée voter hier.

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9 mars 2010 2 09 /03 /mars /2010 20:27

fabrique d'ordres 

Récompenses et médailles : aboutissement de toute une société d'ordre. Nathalie Pages a eu son lot de brevets et diplômes, petit lot, certes, mais elle y tenait. De demi-point en demi-point attribués, elle se sentait grandir. Elle se sentait appartenir. Et plus la coupe est grande, plus on s'y reflète dedans, et tout le groupe dans lequel on s'insère s'y reflète avec soi. La fabrique d'ordres fait de la belle ouvrage : elle façonne les individus en même temps que les rosettes d'honneur qui les ponctuent : petit point final sur la boutonnière. La fabrique d'ordres nous fait exister, parce qu'elle nous classe.
Cet artisanat très efficace a bien des mérites : si chaque chose est à sa place, c'est bien la preuve qu'il y a une place pour chaque chose.
Sauf que ce syllogisme semble un peu fragile ces derniers temps, et qu'il n'est pas si certain que les places libres ne soient pas déjà et toujours réservées.
Nathalie voudrait bien qu'on lui indique l'adresse d'une autre boutique, où l'on fabriquerait autrement la reconnaissance, la connaissance.
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